Jusqu’à quand clocherez-vous des deux côtés ?...
C’est ainsi que le grand prophète Elie s’exprima devant Ephraïm, l’Israël du Nord : « Elie s’approcha de tout le peuple, et dit : Jusqu’à quand clocherez-vous des deux côtés ? Si l’Eternel est Dieu, allez après lui ; si c’est Baal, allez après lui ! » - 1Rois 18 :21. On connait tous cet épisode fameux où l’on voit Elie affronter les 450 prophètes de Baal, les défier de faire tomber le feu sur l’autel. Lui-même, poussant l’épreuve jusqu’à arroser 3 fois le sacrifice, attirera le feu du ciel qui consumera tout l’holocauste. Il fera par la suite égorger les faux prophètes…
Elie est le prophète qui fait tomber le feu du ciel et attire le jugement de D.ieu. L’on sait que les Juifs attendaient Elie, lorsque Jésus se présenta. Les Ecritures nous disent que « avant que ne vienne le Jour de l’Eternel », D.ieu nous enverra Elie, le prophète – Malachie 4 :5.
Israël, la boiteuse
Je crois que dans cette exclamation du prophète, il y a de l’humour[1] ou du cynisme, car Elie était réellement en colère ! On ne boite jamais « des deux côtés » en fait… on ne boite que d’un seul côté, alors pourquoi Elie parle-t-il « des deux côtés » ? Rappelons-nous une autre histoire, celle de Jacob confrontant D.ieu au gué de Yabboq, luttant toute la nuit avec l’Ange. L’ange avait alors frappé Jacob « au côté » pour se libérer et démit sa hanche : « Et le soleil se levait sur lui comme il passait Peniel ; et il boitait de la hanche » - Genèse 32:31. Jacob/Israël était ainsi nommé dans la Bible « la boiteuse » ou « celle qui boite » (hatsalah du verbe tsala‘ ).
Michée 4:6 « En ce jour-là, dit l’Eternel, je rassemblerai celle qui boitait (hatsalah), et je recueillerai celle qui était chassée et celle sur laquelle j’avais fait venir du mal. Et je ferai de celle qui boitait, un reste, et de celle qui avait été repoussée au loin, une nation forte ; et l’Eternel régnera sur eux, en la montagne de Sion, dès lors et à toujours ». Dans nos versions, on parle « des boiteux », comme on parle d’aveugles ou d’estropiés, mais cela n’a pas de rapport.
Israël est « boiteuse » depuis que Jacob a lutté victorieusement contre D.ieu. En fait, Jacob a payé le prix de sa confrontation avec… lui-même. Jacob était rempli de peur vis-à-vis de son frère Esaü. Ce combat au passage du Yabboq (= se dépouiller) honore le courage de Jacob, du peuple juif affrontant son D.ieu et stigmatisant ses peurs. Avec Jacob, Israël prend son destin en main. Il en ressort « boiteux » mais peut en être fier. C’est une blessure de guerre. C’est aussi ce qui le démarque des autres nations. Il est marqué à jamais, et portera par la suite l’opprobre de nations. C’est pourquoi, D.ieu dit qu’Il fera de « celle qui est repoussée et qui boite, une nation forte ». Les « boiteux » deviendront dignes de louange dans les nations où ils étaient affligés : « Voici, en ce temps-là, J’agirai à l’égard de tous ceux qui t’affligent, et Je sauverai celle qui boitait, et Je recueillerai celle qui était chassée, et Je ferai d’elles une louange et un nom dans tous les pays où elles étaient couvertes de honte » - Sop 3:19.
Du Yabboq au Qichon
Elie sait qu’Israël « boite », mais pas « des deux côtés ». C’est une manière imagée de dire qu’Israël fait des compromis inacceptables. Rappelons-nous le contexte : Élie reçoit de l’Éternel l’ordre de se présenter devant le roi Achab. Il s’ensuit la scène du Carmel : les prêtres païens essayent de prouver la divinité de Baal mais en vain. Élie rassemble le peuple autour d’un ancien autel que de pieux Israélites du nord avaient sans doute élevé à l’Éternel, car, à cause de la défection des 10 tribus, ils ne pouvaient pas aller à Jérusalem. Cet autel avait été renversé. Élie, en le rétablissant avec 12 pierres, atteste que le schisme des 12 tribus en 2 royaumes est contraire à la volonté de Dieu. Pour empêcher toute fraude, il ordonne au peuple de verser de l’eau sur l’holocauste et sur l’autel. Puis il implore l’Éternel, et le feu tombe, consumant l’holocauste et l’autel. L’Éternel a manifesté ainsi son existence et sa puissance. Les prophètes de Baal, convaincus d’imposture, sont amenés au torrent de Qichon (= qui se courbe), au pied de la montagne ; là, Élie ordonne de les égorger.
Le Yabboq parle d’une confrontation saine avec D.ieu tandis que Qichon parle du jugement divin sur les faux prophètes qu’Israël a acceptés en son sein, lesquels sont comme des « pièges » (= qosh, d’où vient le mot du torrent Qishon). On sait que depuis que la royauté d’Israël est déchirée en deux parties, le Nord appelé Israël ou Ephraïm a subi les assauts du roi d’Assyrie, lequel a déporté la population juive pour la remplacer par des païens. Par la suite, on fera venir des prêtres de diaspora pour enseigner « la crainte de l’Eternel », car D.ieu avait envoyé des lions terrorisant le pays (lire 2Rois 17).
2 Rois 17 :28 « Ainsi ils craignaient l’Eternel, et ils servaient en même temps leurs dieux d’après la coutume des nations d’où on les avait transportés. Ils suivent encore aujourd’hui leurs premiers usages : ils ne craignent point l’Eternel, et ils ne se conforment ni à leurs lois et à leurs ordonnances, ni à la loi et aux commandements prescrits par l’Eternel aux enfants de Jacob qu’il appela du nom d’Israël »
Le prophète Elie dénonçait ces trois problèmes : 1) la coupure d’avec Juda, 2) l’absence de crainte de l’Eternel et, 3) le paganisme ambiant amenant le peuple à adorer Baal.
Ne boitons-nous pas aujourd’hui « des deux côtés » ?
La Chrétienté d’aujourd’hui est issue de deux siècles d’histoire l’ayant forgée… et déformée. De l’Eglise primitive issue du monde juif, solidement attachée au judaïsme biblique, jusqu’à l’Eglise d’aujourd’hui issue du monde païen et coupée de ses racines hébraïques, il y a un grand fossé. Cette Eglise « païenne » est dénaturée comme était dénaturée l’Israël du nord que le prophète a fustigé afin de la faire réagir.
Nous pouvons faire cette comparaison de la Chrétienté en général avec Ephraïm, l’Israël du nord, ayant rompu avec la foi vivante de Jacob « le boiteux », celle du royaume de Juda, la tribu restée fidèle à D.ieu. Depuis le siècle du roi Constantin et à cause de certains Pères de l’Eglise, la Chrétienté a coupé définitivement ses racines juives. L’Empire s’est alors proclamé « chrétien » et les différents Conciles ont fait la chasse aux « hérétiques juifs ou messianiques » faisant encore chabbat. Le culte était désormais le dimanche, par conformité au jour du soleil[2]- le culte de Mithra[3] dieu du soleil, était très populaire. Le calendrier grégorien a remplacé le calendrier biblique, les fêtes juives et bibliques ont été remplacées par des fêtes païennes – Noël, Pâques, le jour de l’An, la fête des saints, la fête des rois, la St Valentin, etc.
L’Eglise d’aujourd’hui a hérité de ce mélange fait de compromis et d’idolâtrie. La foi première de l’époque des apôtres a été dénaturée, et malgré des prises de conscience, des réformes et la Réforme protestante au 16e siècle, l’Eglise a continué sa course en acceptant ce mélange et ses compromissions. La Première Alliance est devenue caduque et le NT est devenu la seule référence du chrétien moderne. Jésus – Yeshoua haMashia’h – est devenu « un dieu » faiseur de miracle, déconnecté d’avec son Père et dépouillé de son identité juive. La crainte de l’Eternel n’est plus celle que l’on retrouve dans l’AT.
Aujourd’hui où l’on voit l’accomplissement extraordinaire des prophéties antiques avec la restauration d’Israël en 1948 et la réunification de Jérusalem en 1967, l’Eglise prend ses distances en refusant de dire que l’Etat hébreu est la continuité de l’Israël biblique. La « théologie du remplacement » est encore de mise dans l’Eglise. Cette théologie était aussi prônée par la Jézabel[4]de l’époque du prophète Elie. Jézabel personnifie l’Eglise apostate, la « Prostituée ».
Le temps d’Elie : une vraie réformation des cœurs !
Nous en sommes là, et l’apostrophe du prophète Elie nous concerne : « Jusqu’à quand clocherez-vous des deux côtés » ? La crainte de l’Eternel a disparu et notre foi est légère ou superficielle. Nous avons à nous regreffer sur l’Olivier franc. Et si nous croyons qu’Israël n’a aucune légitimité, sachons que si Israël disparaît – si « l’Olivier » tombe – les branches tomberont avec. L’apôtre Paul met en évidence cette image en Romains 11 : le chrétien a été greffé sur l’olivier et précise-t-il, ce n’est pas l’Eglise (les branches) qui porte Israël, ce sont les racines (Israël) qui la porte et la soutient.
Autrement dit, sans la première Alliance (l’AT), sans l’obéissance aux fêtes (juives) de l’Eternel, sans la crainte du D.ieu d’Abraham, d’Isaac et de Jacob, sans la reconnaissance de l’accomplissement des prophéties avec la restauration d’Israël, et sans la foi en un Messie venant rétablir le Royaume davidique sur la terre, que vaut une telle Eglise ?...
Le prophète Elie a égorgé les faux prophètes – demandons-nous quelle sera la destinée des chrétiens reniant leur héritage biblique juif ?
Jésus a dit à ceux qui refusent de reconnaître « les plus petits de ses frères » - les Juifs/Israël : « Retirez-vous de moi, maudits. Allez dans le feu éternel qui a été préparé pour le diable et ses anges » - Mat 25 :41.
Nous avons besoin, l’Eglise a besoin, d’une vraie réformation des cœurs, de nos pensées, de notre conception de la foi et même de D.ieu. Nous avons besoin comme Jacob, de passer par le Yabboq, qui signifie dénuement, pour nous repentir de notre éloignement, comme l’Israël du nord.
La marque sur le front
Si Jacob a été marqué à la hanche pour rentrer dans sa destinée et devenir Israël, il est possible que les chrétiens des derniers temps aient aussi à confronter le D.ieu de Jacob, et qu’ils soient marqués au front, avant d’accueillir le Messie, le Roi des rois : « L’Eternel lui dit : Passe au milieu de la ville, au milieu de Jérusalem, et fais une marque sur le front des hommes qui soupirent et qui gémissent à cause de toutes les abominations qui s’y commettent » - Ezéchiel 9:4.
Nous devons aujourd’hui gémir et soupirer, et comprendre l’éloignement de notre foi. Nous devons absolument la réaligner sur la Bible entière et nous reconnecter aux racines juives ou hébraïques ; c’est une question de vie ou de mort.
GF – le 7 nov 2010
[1] Élie s’est bien moqué des prophètes en leur suggérant, pour faire tomber le feu : « Criez plus fort ! Puisqu’il est un dieu, il est très occupé ; ou bien il a une obligation urgente, ou encore il est en voyage ; peut-être qu’il dort, et il faut le réveiller » - 1Rois 18 :27.
[2] C’est Constantin le Grand, lui-même adorateur du soleil, qui a fait du jour du soleil qui tombait sur le dimanche chrétien le jour férié hebdomadaire public, et c’est probablement sous son règne aussi que la fête de Noël fut fixé au jour de l’ancienne fête de la naissance du sol invictus (culte du soleil), le 25 décembre.
[3] Mithra est la religion du soleil (tradition perse). Christ a remplacé le dieu Mithra. On sait que le culte du sol invictus (soleil invaincu) introduit de l’Orient, a connu une influence croissante dans l’Empire romain du 2e et 3e siècle. Cette religion était un concurrent sérieux du Christianisme. La grande fête du « Soleil Invaincu » avait lieu le 25 décembre, soit la date du solstice d'hiver selon le calendrier julien : c'était le Dies Natalis Solis, « Jour de naissance du Soleil », christianisé par la suite en Occident (Natalis a donné Natale en italien, Noël en français).
[4] C’est Jézabel qui a fait tuer « Naboth le juste » pour voler sa vigne et l’offrir au roi Achab - la vigne est symbolique d’Israël. Jézabel, fille d’un roi païen, voulait substituer à la crainte de l’Eternel, le culte de Baal et d’Astarté. Jézabel symbolise l’Eglise des derniers temps, la « Prostituée ».